LA PLACE DE L’ERGONOMIE DANS LA PRÉVENTION DE LA SANTÉ ET LA SÉCURITÉ AU TRAVAIL
La prévention vise à réduire les risques d’accidents et d’atteintes à la santé liés au travail. Elle se base sur des concepts et des façons d’envisager ce qu’est un risque, un travailleur ou encore le travail. Il en résulte 2 grandes approches :
- L’une centrée sur le risque comme processus ;
- L’autre centrée sur le travail pour tenir compte de la complexité des situations.
Ces 2 orientations apparaissent du fait de la relation entre les lésions et les sources de danger / le risque :
- Certaines lésions sont en lien direct avec une source de danger (ex. : une coupure va être en lien avec une surface coupante et rien d’autre) ;
- D’autres lésions sont en lien avec plusieurs sources de danger (ex. : la surdité peut être causée par le bruit, mais aussi par certains produits chimiques neurotoxiques) ;
- Certains risques peuvent entraîner plusieurs lésions (ex. : l’amiante peut provoquer autant l’amiantose qu’un mésothéliome).
Toujours est-il que ces différentes relations, soit entre les lésions et leurs sources, sont clairement documentées. On peut alors se concentrer sur les risques.
Toutefois, pour certains types de lésions, cette relation avec les sources de risque n’est pas si claire. C’est ainsi pour les troubles musculosquelettiques ou les troubles psychosociaux qui n’ont pas de source de risque spécifique. Impossible, donc, d’utiliser une approche centrée sur le risque. En outre, certaines lésions qui ont une relation bien établie avec la source de risque ont lieu dans des situations de travail complexes pour lesquelles les solutions ne sont pas évidentes. C’est dans ce type de situations que l’approche centrée sur le travail, soit celle réalisée par un ergonome ou un ergothérapeute œuvrant dans le domaine de l’ergonomie, sera privilégiée.
Les actions de prévention centrées sur le risque : qu’est-ce c’est ?
Les actions de prévention centrée sur le risque ont plusieurs degrés d’actions possibles. Le premier et principal degré d’action, c’est lorsque la source de risque est identifiée et qu’on cherche à l’éliminer. On évite alors l’existence d’une situation dangereuse.
- Exemple type : nous avons un produit chimique toxique à utiliser, nous allons chercher un produit permettant la même action industrielle, sans toutefois être toxique et nous allons en faire une substitution ;
- Deuxième cas de figure : s’il n’est pas possible d’agir à la source, nous allons chercher à agir entre la source de risque et le travailleur. Si nous ne pouvons pas trouver un produit chimique équivalent, nous allons encoffrer le produit toxique, trouver des équipements réduisant la manipulation directe ou encore agir sur l’organisation du travail, par exemple pour réduire la durée d’exposition du travailleur au produit ;
- Enfin, si cette solution n’est pas possible, nous pourrons en dernier recours agir sur le travailleur lui-même en lui fournissant une formation sur une méthode de travail sécuritaire ou sur l’utilisation des équipements de protection individuelle pour réduire les effets néfastes du produit toxique sur sa santé.
L’apport de l’ergonomie : les actions centrées sur le travail
Grâce à sa méthodologie appelée l’analyse du travail réel, l’ergonome ou l’ergothérapeute œuvrant dans le domaine de l’ergonomie apporte à la prévention les possibilités d’actions de prévention centrées sur le travail. Ces actions peuvent servir de complément aux actions centrées sur le risque, mais sont également indispensables dans certaines situations. En effet, lorsqu’une lésion est engendrée dans une situation complexe (ex. : un excès de bruit d’une machine, mais un environnement dans lequel les travailleurs ont besoin d’entendre certains sons pour bien réaliser leur travail) ou bien une lésion pour laquelle la source de risque n’est pas facilement identifiable, les actions centrées sur le travail sont indispensables.
En pratique, qu’allons-nous faire ?
Cette approche centrée sur le travail vise à élargir le cadre analyse. Nous allons réaliser une analyse du travail directement dans les situations de travail, passant par l’observation et l’écoute des travailleurs. Cela va servir à identifier les déterminants de l’activité de travail qui sont à l’origine des problèmes de santé. À la suite de cette analyse, les actions visant à transformer le système de travail prendront la forme de recommandations sur des aspects techniques, organisationnels ou de formation. Ainsi, dans le cas des troubles musculosquelettiques, les propositions de transformation pourraient porter sur :
- Les aspects techniques des machines ou du mobilier ;
- Le développement des compétences des salariés et de l’encadrement ;
- La conception du processus de travail (ex. : le flux des produits) ;
- Les espaces de travail ;
- La conception du produit proprement dit avec des techniques permettant de réduire l’activité nécessaire à l’assemblage d’un produit ;
- L’aménagement du temps travail et notamment l’aménagement des temps de récupération ;
- La mise en place d’une rotation des postes de manière à amener de la variété gestuelle ;
- La modification de l’organisation des équipes pour favoriser la coordination au plus près du terrain et l’entraide entre salariés, etc.
En conclusion, si dans certains cas faire simple est suffisant, certaines lésions et certaines situations plus complexes nécessitent une approche centrée sur le travail et son organisation ainsi que, le plus souvent, une approche multidisciplinaire au cœur de laquelle l’ergonomie à un rôle majeur à jouer.
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